Quel dommage
Ce film est visiblement une lettre d’amour au Cinéma, de type pellicule, tel qu’on en faisait l’expérience encore dans les années 80, 90. Une pellicule que l’on visionnait dans le noir, en groupe, une expérience commune physique. Et le film travaille très fort à recréer cet univers – boucaneux, truffé d’affiches, d’odeurs de pop-corn et aux planchers collants.
Les artisans se démènent : la direction photo utilise fréquemment des palettes de couleurs en référence au Giallo (gardez l’oeil ouvert, y’a des références directes à Argento un peu partout), des plan serrés et un sens du flou très typique des décades 70 et 80 ; la trame sonore est travaillée et dégouline de synthés typés, mais est malheureusement sous-utilisée. Beaucoup de travail avec très peu de moyens et beaucoup d’amour, ça se sent.
De plus, c’est pas un film des USA, mais bien de l’amérique latine, et ça fait changement d’entendre autre chose que de l’anglais.
Le récit, par contre, ne va pas très loin ; un cinéma de quartier, une ado qui remplace son père au travail (projectionniste de cinéma), un fou qui égargouille les (quelques) spectateurs durant une représentation d’une adaptation visiblement plate de Frankenstein.
Y’a plusieurs métaphores qui se superposent tout au long – la cabine du projectionniste qui transforme l’ado en voyeure impuissante pour la première partie du film, qui représente un peu l’expérience du cinéma lui-même. Les spectacteurs, eux, symbolisent les différents aspects de l’expérience cinématographique : l’innocence bafouée, l’érotisme agace, l’immaturité adolescente qui ne s’intéresse qu’aux extrêmes (le trio d’ados – qui arrive bruyamment en retard – ne commence à porter attention à l’écran que lorsque la créature commence à tuer).
L’assassin de “The Last Matinee”, par contre, est tiède. Pas de motivation, plus que stéréotypé (très difficile de ne pas penser que son accoutrement est une copie volontaire de celui de l’assassin de I Know What You Did Last Summer.
Ce qui n’aide pas le film non plus est un rythme inégal, lent. Trop lent. Ce qui fait qu’arrivé au dernier tiers, l’intérêt n’y est plus vraiment. Ça n’apporte pas grand chose d’original, parce que malgré la représentation métaphorique intéressante, le film ne va pas plus loin, ne trouve pas de manière d’en faire un commentaire intéressant, outre le fait qu’il déplorer visiblement la mort de l’expérience cinématographique commune en salle et la perte de la culture cinématographique.
Trop long, trop lent, trop léger. Dommage.
Vu sur Shudder