Puissant
Les européens ont un flair visuel et diégétique qui leur est propre et unique ; ils se permettent des scénarios plus noirs, des personnages plus ambigüs, des morales plus floues. Et réussissent souvent à faire passer le tout sans tomber dans l’inévitable ton pédagogique ou paternaliste des films populaires américains. Même lorsque, comme dans le film de Ridremont, ils font usage des mêmes techniques narratives et sonores
Pas de héros singulier qui tromphe, pas de dichotomies simpliste entre le bien et le mal ; la protagoniste, Eva, est paraplégique depuis un terrible accident ; sa meilleure amie lui ramène d’Allemagne un immense calendrier de l’Avent en bois, plus précisément du marché de Noël de Munich.
Splendide
Ledit calendrier est un objet phénoménal ; massif, en bois, à 24 tiroirs macabres et tordus, avec un “jack-in-the-box” qui se pointe au moment opportun. La direction photo est définitivement amoureuse du bibelot, et on le devient aussi – les prises de vues qui l’incluent sont gorgées d’atmosphère menaçante ; Ridremont avoue qu’il a englouti une bonne partie du budget du film. La couleur est saturée, et les teintes criardes à la Giallo italien crèvent la noirceur ambiante.
La trame sonore est judicieuse (quoique pas vraiment novatrice) et jamais tape-à-l’oeil.
Imparfait
Selon le récit qu’on nous présente ici, Eva doit obéir au calendrier jusqu’à la fin, qui, de nature évidemment pas fine-fine, devient de plus en plus exigeant, ça va de soit, ce qui va pousser la fibre morale d’Eva (mais pas toujours de manière cohérente ; certains moments détonnent par leur froideur, incluant les réactions de la protagoniste).
Les dialogues sont savoureux, bien écrits et costauds (faut bien être en Europe pour que le film passe le test de Bechdel!).
L’intrigue est serrée et efficace durant la première moitié, mais pique du nez au milieu alors que le film se met à hésiter entre le-calendrier-est-une-créature et y’a-une-créature-pas-belle-qui-menace, en introduisant une espèce de beubite glauque pour supplémenter le machiavélique mécanisme (je vous laisse établir vous-même le lien très évident entre les deux).
L’atmosphère fragile et tendue que Ridremont tricote habilement se déchire aussi avec la présence démoniaque, alors que le visuel bascule dans la surenchère et que certains personnages sont détruits avant que leur contribution ne prenne une valeur substantielle.
MAIS, une fois les quelques 30 minutes faiblardes écoulées, le train repart de plus belle et nous mène vers une finale punchée et irrésolue comme le font les meilleurs films du genre.
À voir !
Vu sur Shudder