Le boum entendu jusqu’à Londres
Le hasard crée parfois d’incroyables événements. Dans ce cas-ci, une troupe amateur (mais dévouée) de chauffeurs d’autobus qui se changent les idées en jouant du pantomime dans un petit village en Angleterre, qui décide de faire l’immense pari d’adapter Alien, de Ridley Scott (rien de moins!)… sur scène !
Après les flops immenses sur Broadway tels Spider-Man : Turn Off The Dark [i]La comédie musicale, bien que montée par Julie Taymor, dont plusieurs films sont des comédies musicales et des adaptations Shakespeariennes saisissantes, fut un désastre total : accidents, … Continue reading, qui disposent eux de l’aval des artisans originaux, de (tonnes) d’individus expérimentés et de montagnes de financement, on est bien en droit de se demander ce qu’un petit groupe d’irréductibles anglais est en mesure de livrer.
Le documentaire démontre bien que, parfois, l’amour inconditionnel, la débrouillardise et la dévotion font plus de que des montagnes de fric.
Digne du festival Fringe

La production résultante, que le documentaire présente dans son sprint de fin, aurait été parfaitement à l’aise dans une édition du festival Fringe, quelque part. Le mélange d’acteurs amateurs et du (très impressionnant) travail de costumes [ii]La bibitte ! Je ne vendrai pas de punch ici, mais mon Dieu qu’il existe des gens débrouillards ! et de décors confère au tout une atmosphère intimiste et gaillarde qui manque cruellement dans certaines productions “sérieuses” (j’ai vu Icare, au TNM, et c’était là aussi un bel exemple du fait que toute la techno du monde, mêlée à des acteurs à longue feuille de route, rate quand même parfois la cible quand le gâteau lève pas…).
Alors que des extraits de la représentation défile, je me suis rappelé avec joie la pièce “Doctor Who and the Furious Florafaunaphiles” qui, à travers un texte original, mélangeait références pour les fans et humour absurde avec brio, dans un décor minimaliste mais efficace. Ou la comédiee musicale “Evil Dead : The Musical”, présentée à Just For Laughs à Montréal ; ici encore, une relecture de l’oeuvre originale remplie d’adoration et d’hommages (et fort réussie, d’ailleurs).
La fascination que l’on éprouve à regarder cette micro troupe se démener comme des diables dans l’eau bénite après avoir accepté un défi de taille (présenter la pièce à Londres, dans ce qui semble ressembler à un théâtre Ste-Catherine mais plus huppé) … et réussir, est palpable.
Un hommage vibrant
Le film, tourné par deux jeunes premières aussi toquée de l’idée que les protagonistes eux-mêmes, est une lettre d’amour au théâtre, à la joie simple, au dépassement de soi et aux aléas de la vie. C’est une heure trente de bonbon, qui nous sort de notre misère le temps de suivre les hauts et les bas de ces hurluberlus.
Certains ont fait allusion à l’oeuvre de Christopher Guest, et je peux comprendre pourquoi – la nature ingénue des individus (anglais, de plus) qui se retrouvent dans une situation cocasse et inattendue, voire même quasi absurde, et la chaleur de leur épopée rocambolesque, sans oublier le fait qu’ils ont des personnalités bien campées et drôles. Le cynisme et la satire typique de Guest n’est pas au rendez-vous, par contre, et c’est tant mieux. Pas de schadenfreude ici, on prend plaisir à voir les autres réussir et non se planter.
C’est un portrait humaniste et intimiste – pas de polémique, pas de grandes question, pas de confrontation avec les grandes fresques orgiaques [iii]quoique certaines images furtives du West End de Londres y font rapidement allusion ou de commentaire sur la nécessité du Do It Yourself. Juste deux filles qui trippent à suivre une gang de sautés qui sont renversés par ce qui leur arrive. [iv]Y’a peut-être un peu de méta là-dedans, si on considère la trajectoire d’une troupe qui se dit tannée du pastiche parodique des pantomimes et qui, par la force des choses, retombe dedans – à … Continue reading
Et de savoir, par surcroît, que c’est pas une seule fois, mais plusieurs années de suite qu’ils se sont produits, ne fait que rajouter au bonheur.
J’aurais tellement acheté un billet pour voir ça – et je le me serais absolument levé à la fin ! Chapeau, Paranoid Dramatics !
Notes
↑i | La comédie musicale, bien que montée par Julie Taymor, dont plusieurs films sont des comédies musicales et des adaptations Shakespeariennes saisissantes, fut un désastre total : accidents, livraison beaucoup trop tardive, réalisation si faible que Taymor a été jetée hors du projet avant son ouverture, etc. Bref, un vrai flop. |
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↑ii | La bibitte ! Je ne vendrai pas de punch ici, mais mon Dieu qu’il existe des gens débrouillards ! |
↑iii | quoique certaines images furtives du West End de Londres y font rapidement allusion |
↑iv | Y’a peut-être un peu de méta là-dedans, si on considère la trajectoire d’une troupe qui se dit tannée du pastiche parodique des pantomimes et qui, par la force des choses, retombe dedans – à un moindre degré – au final. |