Ça devrait pas marcher. Ça devrait être une petite pellicule de série Z qui tient pas debout, sans intérêt. Un film de monstre – à propos d’une paire de pantalons qui tue. Voyons donc.
C’est pas une première – on n’a qu’à penser à Attack of the Killer Tomatoes ou, plus près de nous, Rubber et son pneu télékinésique qui tue, ben, parce que.
Mais le film fait le pari de construire un film de monstre où la créature n’est pas le sujet principal, où le récit va plus loin. C’est même une créature qui a une raison d’être à la hauteur de Swamp Thing ou Toxic the Avenger. C’est pas peu dire pour une paire de pantalons !
C’est une critique cinglante de l’industrie du vêtement, du marketing moderne et des frénésies dans lesquelles les consommateurs de mode embarquent. C’est drôle, ça touche un paquet de sujets au passage et ça garde une saveur très canadienne.
Pas surprenant que EMA Films, la boîte de production qui avait ramassé le déjanté Turbo Kid (je promets d’en reparler, c’est un des meilleurs films de genre canadien dans mon palmarès des 20 dernières années) ait mis la main sur celui-là, grâce à Frontières, le marché du film rattaché au festival Fantasia (Dieu que je m’ennuie de ses salles bondées et ses projections à minuit pleines de cinéphiles débiles!).
La facture visuelle est plus télé que cinéma (le budget est petit, et ça paraît), mais ça évite qu’on tente de nous en mettre plein la vue avec de la direction photo plutôt que du contenu. C’est presqu’un huis-clos (y’a peut-être 4 pièces en tout?) et c’est tant mieux, ça évite les débordements – ça empêche le scénario de se donner des idées de grandeur à partir d’une idée qui est au départ fichtrement mince.
Un film drôle, qui beurre-épais-mais-pas-tant-que-ça (ça peut parfois sonner un peu faux – mais jamais très longtemps), qui ne nous prend pas toujours par la main et qui assume son burlesque absurde. Y’a des clins d’oeils à Cronenberg et à Fincher (pour ne nommer que ceux-là), l’humour est pince-sans-rire, et je suis convaincu que la version française est horrible, parce que c’est plein d’expressions et de réactions typiques du ROC.
Y’a une noblesse du traitement et une détermination à rester dans le ton qui est typique du cinéma féminin de genre ; Elza Kephart fait définitivement dans le less-is-more plutôt que dans le dans-ta-face, et ça sert le film à merveille.
Le mal est un peu partout dans cette histoire et chacun y reçoit son dû, avec quelques surprises – mais justice est définitivement faite ; important : si vous choisissez ce film, regardez-le jusqu’à la dernière seconde. Le punch post-générique vaut la chandelle.
Et, bonus, ça passe le Bechdel Test !
Vu sur Shudder.